L’enfance n’est pas l’innocence, de Jean Marc Cerino à Sonia Foulc
“A propos d'une des dernières peintures de Sonia Foulc et de toutes les autres”
légèrement délavés.
Pourtant dans cette scène somme toute simple, voire quotidienne, quelque chose de terrible semble en suspend. Tant dans ce visage légèrement "adulte", semblant déformé par une plongée exagérée du cadrage -une distance exagérée qui ne serait plus celle de l'adulte vers l'enfant mais comme dans un basculement improbable que seul l'art peut permettre, celle de l'enfant vers l'adulte donnée dans les yeux de l'adulte -que dans cette forme traînée par l'enfant, comme ramenée de la forêt. Une forme constituée de deux aplats verts clairement délimités pouvant renvoyer à des bois de cervidés et d’une masse informe grise pouvant quant à elle évoquer une carcasse faite de poils, de chair et d’os ; l'ensemble donnant l'impression d'une véritable charogne.
Une ambiance sourde, presque angoissante émane de cette peinture, pouvant évoquer, comme en écho, certains passages de La Nuit du chasseur de Charles Laughton ou de La Route de Cormac McCarthy. Qu’a-t-on demandé à cette enfant d’aller chercher ? À moins que ce ne soit tout simplement elle qui remmène cette chose et risque de se faire réprimander de l’avoir là.
Pourtant cela pourrait être également un simple jeu de matière et de forme pouvant renvoyer à tout autre chose, voire à rien d’autre que de la peinture, traînée par l’enfant. De la peinture à la surface même de la toile alors que l’enfant elle s’efface petit à petit dans la perspective de la plongée. Une impression renforcée par la constitution en diptyque de cette œuvre. Dans lequel le panneau de droite en léger décochement, n’est au final constitué que de matière et de formes abstraites et presque informelle si ce n’était le motif décoratif des cœurs.
“L’enfance de la peinture n’est pas l’innocence”
Par delà l’aspect biographique qui travaille, traverse, la peinture de Sonia Foulc, et qui l’a profondément marqué dans sa recherche d’une voix, ce qui surprend avant tout dans la démarche de cette toute jeune artiste c’est cette volonté de vouloir tout porter en même temps, de tout hisser à la même hauteur, de se charger de la responsabilité de la totalité de ce que doit véhiculer tout acte réel de création : représentation, présence, sujet, sens …
Attitude l’amenant à faire de la peinture en pensant vivement et profondément le médium et dans le même temps à ne le considérer que comme un moyen ; à penser réellement et au plus loin le sujet (philosophiquement, socialement, existentiellement) et en même temps ne le considérer que comme un alibi à faire de la peinture.
d’une vitalité, d’une respiration, d’une tension, autant d’idées qui s’apparentent à une présence, à un être-là.”
Car seule une forte confiance dans la peinture (la qualité des couleurs, des formes, des matériaux, de leur mise en œuvre… comme des sujets abordés) peut permettre l’apparition de cette étrange présence, d’atteindre cette voix particulière que Sonia Foulc recherche : “Je cherche à situer mes productions entre le haut et le bas, sur une lame de rasoir, positionnant aussi bien mes figures que celui qui les regarde dans un équilibre précaire.”
À travers cet équilibre précaire que Sonia Foulc recherche, ce sont les conditions justes voire “éthiques” de faire des images qu’elle interroge, offrir en même temps au spectateur le sujet, ces figures, et la distance ou le retrait par rapport à ce sujet afin d’échapper à tout pathos ou à toute fascination ; ce qui ne rejette en rien l’émotion ou la sensation. C’est proposer et laisser au spectateur la possibilité d’un espace, voire d’un espacement. Car c'est bien là, dans cet espacement, que la qualité symbolique et métaphorique de l'art à inaugurer de nouvelles postures, de nouveaux rapports, sans rien imposer, en laissant le sens ouvert se joue. Un don et un retrait offert en même temps. Opérer de tels choix de représentation, c’est faire le deuil "du tout dire" ou "du tout montrer" afin d’être au plus prêt de la complexité du monde et des êtres.
Jean Marc Cerino
mardi 27 avril 2010
TaDaAAaaaaamM
Ce n'est certainement pas sa forme définitive mais bon depuis que j'en parlais, voila qui est fait!